Hélène a bientôt quarante ans. Elle est née dans une petite ville de l'Est de la France. Elle a fait de belles études, une carrière, deux filles et vit dans une maison d'architecte sur les hauteurs de Nancy. Elle a réalisé le programme des magazines et le rêve de son adolescence : se tirer, changer de milieu, réussir.
Et pourtant le sentiment de gâchis est là, les années ont passé, tout a déçu.
Christophe, lui, vient de dépasser la quarantaine. Il n'a jamais quitté ce bled où ils ont grandi avec Hélène. Il n'est plus si beau. Il a fait sa vie à petits pas, privilégiant les copains, la teuf, remettant au lendemain les grands efforts, les grandes décisions, l'âge des choix. Aujourd'hui, il vend de la bouffe pour chien, rêve de rejouer au hockey comme à seize ans, vit avec son père et son fils, une petite vie peinarde et indécise. On pourrait croire qu'il a tout raté.
Et pourtant il croit dur comme fer que tout est encore possible.
Connemara c'est cette histoire des comptes qu'on règle avec le passé et du travail aujourd'hui, entre PowerPoint et open space. C'est surtout le récit de ce tremblement au mitan de la vie, quand le décor est bien planté et que l'envie de tout refaire gronde en nous. Le récit d'un amour qui se cherche par-delà les distances dans un pays qui chante Sardou et va voter contre soi.
Dans une Amérique au bord du chaos politique et climatique, un père embarque son jeune fils souffrant de troubles du comportement dans une sidérante expérience neuroscientifique. Richard Powers signe un nouveau grand roman questionnant notre place dans le monde et nous amenant à reconsidérer nos liens avec le vivant.
Alors que son épouse attend leur troisième enfant, Nobuki Niré trouve un vieux cahier dans l'un des tiroirs de son ancien bureau d'écolier. Il s'agit du journal que sa mère, atteinte d'Alzheimer, a éprouvé le besoin de tenir lorsqu'elle a senti sa mémoire décliner. À travers ces quelques mots, parfois quotidiens, parfois intimes, Nobuki va découvrir une femme qui a eu une vie avant lui, à travers lui, et qui désormais ne peut plus en rendre compte.
Août 1992. Une vallée perdue quelque part à l'Est, des hauts fourneaux qui ne brûlent plus, un lac, un après-midi de canicule. Anthony a quatorze ans, et avec son cousin, ils s'emmerdent comme c'est pas permis. C'est là qu'ils décident de voler un canoë pour aller voir ce qui se passe de l'autre côté, sur la fameuse plage des culs-nus. Au bout, ce sera pour Anthony le premier amour, le premier été, celui qui décide de toute la suite. Ce sera le drame de la vie qui commence. Avec ce livre, Nicolas Mathieu écrit le roman d'une vallée, d'une époque, de l'adolescence, le récit politique d'une jeunesse qui doit trouver sa voie dans un monde qui meurt, cette France de l'entre-deux, celle des villes moyennes et des zones pavillonnaires, où presque tout le monde vit et qu'on voudrait oublier.
Melchor, un policier au nom de roi mage, ex-repris de justice et fils d'une prostituée, qui a fait des "Misérables" de Victor Hugo son vade-mecum vital, mène l'enquête sur les terres de l'Ebre, à l'extrême sud de la Catalogne. Mais ici plus qu'ailleurs "tôt ou tard, tout s'explique par la guerre" et il devra faire sien le dilemme de Jean Valjean : "Rester dans le paradis, et y devenir démon, rentrer dans l'enfer, et y devenir ange !".
L'Allemagne nazie a sa légende. On y voit une armée rapide, moderne, dont le triomphe parait inexorable. Mais si au fondement de ses premiers exploits se découvraient plutôt des marchandages, de vulgaires combinaisons d'intérêts ? Et si les glorieuses images de la Wehrmacht entrant triomphalement en Autriche dissimulaient un immense embouteillage de panzers ? Une simple panne ! Une démonstration magistrale et grinçante des coulisses de l'Anschluss par l'auteur de "Tristesse de la terre" et de "14 Juillet" qui lui a valu le prix Goncourt 2017.
«Arbre de l'oubli »brosse le portrait d'une famille américaine aisée, privilégiée, éduquée... puis, élargissant le tableau peu à peu, nous montre les fils inattendus qui relient cette famille aux pages les plus sombres de l'Histoire moderne. En dessinant un chemin tortueux à travers l'émancipation pas toujours réussie de trois personnages complexes, le roman aurait pu prendre les tonalités d'un parcours initiatique. Mais il s'agit, une fois le tableau appréhendé dans sa globalité, d'un grand roman d'Histoire vivante tant il convoque les enjeux essentiels d'aujourd'hui : racisme, religion et laïcité, procréation pour autrui, violence, misère et colère, féminisme et représentation.
En vacances à Majorque, la fille de Melchor, devenue une adolescente rebelle, est retenue prisonnière dans la villa d'un magnat de la com, réputé pour fournir à ses amis une large palette de "chair fraîche". Javier Cercas disait récemment dans un entretien que "l'antidote à l'injustice, c'est la solidarité et l'amour". Il le démontre ici dans un thriller révolté qui dénonce l'intolérable impunité des puissants et interroge la valeur des héros "ordinaires".
Au début de l'histoire, la mort d'une femme qui, il y a longtemps déjà, a décidé de se taire. Elle adresse ses dernières volontés aux jumeaux Jeanne et Simon, ses enfants. C'est le début d'un périple lourd de révélations sur leur identité. Le deuxième volet du cycle dramaturgique présenté dans son intégralité au festival d'Avignon 2009.
Autrefois, Zem Sparak fut, dans sa Grèce natale, un étudiant engagé, un militant de la liberté. Mais le pays, en faillite, a fini par être vendu au plus offrant, malgré l'insurrection. Et dans le sang de la répression massive qui s'est abattue sur le peuple révolté, Zem Sparak, fidèle à la promesse de toujours faire passer la vie avant la politique, a trahi. Au prix de sa honte et d'un adieu à sa nation, il s'est engagé comme supplétif à la sécurité dans la mégalopole du futur. Désormais il y est «chien» -c'est-à-dire flic - et il opère dans la zone 3, la plus misérable, la plus polluée de cette Cité régie par GoldTex, fleuron d'un post-libéralisme hyperconnecté et coercitif. Mais au détour d'une enquête le passé va venir à sa rencontre.
Avec "Chien 51", Laurent Gaudé s'aventure dans le "futur" ; à la fois lyrique, philosophique et tragique, politique aussi, c'est toujours l'homme qu'il questionne.
1984. Cléo, treize ans, de milieu modeste, se voit un jour proposer d'obtenir une bourse délivrée par une mystérieuse Fondation pour réaliser son rêve : danser. Mais c'est un piège, sexuel, monnayable, qui se referme sur elle et dans lequel elle va précipiter d'autres collégiennes.
2019. Un fichier de photos est retrouvé sur internet et suscite un appel à témoins destiné à identifier les anciennes victimes de la Fondation. Devenue danseuse de variétés, Cléo comprend que le passé est revenu la chercher, et qu'il est temps pour elle d'affronter son double fardeau de victime et de coupable.
À travers le portrait qu'en dressent ceux qui ont croisé et aimé Cléo, Lola Lafon explore, dans ce roman d'une justesse bouleversante, les systèmes de prédation et leur mécanique implacable. Avec empathie, elle dit aussi les corps sublimés et les corps souffrants, les lois du silence, l'impossibilité du pardon, et le sourire obligatoire derrière lequel sont tapies tant de douleurs.
Un changement dans la vie de Satoru fait qu'il doit se séparer de Nana, son chat adoré. Débute alors une série de voyages chez des amis d'enfance, aux quatre coins du Japon, pour lui trouver un nouveau foyer. Mais le rusé matou, narrateur de ce savoureux roman, ne l'entend pas de cette oreille : il fera tout pour rester avec Satoru et prolonger l'aventure.
Deuxième roman de Don DeLillo, publié en 1972, "End Zone" met en scène un joueur de football américain dans une équipe universitaire obsédé par la menace de la guerre nucléaire dont il se met à confondre le langage avec le lexique de la technique footballistique.
Une étude fascinante sur la relation obsessionnelle que les hommes entretiennent avec le conflit et la confrontation.
Élevé au rang de classique contemporain par la critique internationale«, L'Ombre du vent», le livre aux 25 millions de lecteurs, est le premier volet de la saga du «Cimetière des Livres oubliés», magistralement conclue par «Le Labyrinthe des esprits» (Actes Sud, 2018).
Par un dimanche soir de 2022 où doit se jouer le «Super Bowl», cinq amis se sont réunis pour l'occasion alors qu'une catastrophe semble avoir frappé le monde autour d'eux. Toutes les connexions numériques viennent d'être coupées et, dans le huis clos de l'appartement de Manhattan, les mots se mettent à tourner à vide. La vie s'échappe, mais où ? Et le silence s'installe. Jusqu'à quand ? Un roman percutant qui tombe à point nommé et prend la forme d'une saisissante conversation sur notre humanité, orchestrée par l'une des voix les plus éblouissantes et essentielles de la littérature américaine.
Dotant un professeur de philo d'un stoïcisme féroce et joyeux, Fernando Aramburu donne à voir les vicissitudes d'un homme, apparemment sans qualités, qui entend mettre un terme à cette comédie tragique qu'est la vie. Pendant 365 jours, il consigne invariablement et sans filtre aucun les faits saillants de son existence : les rêves débridés et les petites misères d'un homme un peu dépassé par la marche du monde mais à la mauvaise foi inébranlable !
Quand Salina meurt, il revient à son fils, qui a grandi seul avec elle dans le désert, de raconter son histoire, celle d'une femme de larmes, de vengeance et de flamme. Laurent Gaudé réinvente les mythes pour écrire la geste d'une héroïne lumineuse et sauvage.
Gardien de la citadelle Europe, le commandant Salvatore Piracci navigue depuis vingt ans au large des côtes italiennes, afin d'intercepter les embarcations des émigrés clandestins. Plusieurs événements viennent ébranler sa foi en sa mission et donner un nouveau sens à son existence. Dans le même temps, au Soudan, deux frères s'apprêtent à entreprendre le long et dangereux voyage qui doit les conduire vers le continent de leurs rêves, l'Eldorado européen. Parce qu'il n'y a pas de frontière que l'espérance ne puisse franchir, Laurent Gaudé fait résonner la voix de ceux qui, au prix de leurs illusions, leur identité et parfois leur vie, osent se mettre en chemin pour s'inventer une terre promise.
Alexandre et Ada forment un couple heureux et s'apprêtent à accueillir un enfant. À l'heure de partir pour la maternité, Ada confie son premier-né à leur voisine Sandra, une célibataire qui a décidé de longue date qu'elle ne serait pas mère. Après cette soirée, celle-ci garde pourtant un attachement indéfectible au jeune garçon. Quelques années plus tard, sur un site de rencontres, Alexandre fait la connaissance d'Alba, une enseignante qui l'impressionne par sa beauté lisse et sa volonté de fer...
Sandra, Alexandre, Alba - sur ces trois piliers, Alice Ferney construit son roman : en révélant les aspirations, les craintes, les hésitations, les choix de ces personnages, elle orchestre une polyphonie où s'illustrent les différentes manières de vivre à deux, et d'être parent - ou de ne pas l'être.
Alternant les points de vue pour déplier toutes les réalités d'un projet ou d'une certitude, elle ausculte magistralement une société qui sans cesse questionne le bonheur familial et repousse les limites de la nature pour répondre aux quêtes individuelles.
Depuis Les Cercueils de zinc et La Supplication, Svetlana Alexievitch est la seule à garder vivante la mémoire de cette tragédie qu'a été l'URSS, la seule à écrire la petite histoire d'une grande utopie. Mais elle est avant tout un écrivain, un grand écrivain. Ce magnifique requiem utilise une forme littéraire polyphonique singulière, qui fait résonner les voix de centaines de témoins brisés.
Parce qu'un viol a fondé leur lignée, les Scorta sont nés dans l'opprobre. A Montepuccio, leur petit village d'Italie du sud, ils vivent pauvrement, et ne mourront pas riches. Mais ils ont fait voeu de se transmettre, de génération en génération, le peu que la vie leur laisserait en héritage. Et en dehors du modeste bureau de tabac familial, créé avec ce qu'ils appellent «l'argent de New York», leur richesse est aussi immatérielle qu'une expérience, un souvenir, une parcelle de sagesse, une étincelle de joie. Ou encore un secret. Comme celui que la vieille Carmela - dont la voix se noue ici à la chronique objective des événements - confie à son contemporain, l'ancien curé de Montepuccio, par crainte que les mots ne viennent très vite à lui manquer.
Roman solaire, profondément humaniste, le livre de Laurent Gaudé met en scène, de 1870 à nos jours, l'existence de cette famille des Pouilles à laquelle chaque génération, chaque individualité, tente d'apporter, au gré de son propre destin, la fierté d'être un Scorta, et la révélation du bonheur.
Au travers du personnage de Susan, assistante souffre-douleur, Régine Detambel revient sur les dernières années de la vie de la grande tragédienne Sarah Bernhardt, ses triomphes, ses amours, ses lendemains qui déchantent, ses obsessions, sa fortune, ses sommets, ses tréfonds. Tout y est hautement romanesque et délicieusement extravagant.
2023 marquera le centenaire de la mort de Sarah Bernhardt dont la devise est restée "Quand même" jusqu'au bout.
Pour les besoins d'une thèse consacrée à «la vie à la campagne au XXIe siècle», l'apprenti ethnologue David Mazon a quitté Paris et pris ses quartiers dans un modeste village des Deux-Sèvres. Logé à la ferme, bientôt pourvu d'une mob, s'alimentant au Café- Épicerie-?Pêche et puisant le savoir local auprès de l'aimable maire - également fossoyeur -, le nouveau venu entame un journal de terrain.
Mais il ignore encore quelques fantaisies de ce lieu où la Mort mène la danse. Quand elle saisit quelqu'un, c'est pour aussitôt le précipiter dans la Roue du Temps, le recycler en animal aussi bien qu'en humain, lui octroyer un destin immédiat ou dans une époque antérieure.
À l'exception d'une trêve de trois jours par an au cours de laquelle est donné un banquet afin que les fossoyeurs ripaillent, sans scrupule et dans une fabuleuse opulence de nourriture, de libations et de langage. Car les saveurs de la langue, sa rémanence et sa métamorphose, sont l'épicentre de ce roman hors normes, aussi empli de truculence qu'il est épris de culture populaire, riche de mémoire, fertile en fraternité.
Au seuil de la mort, Leonard Fife, célèbre documentariste, accepte une interview filmée que veut réaliser l'un de ses disciples, Malcolm. Fife a exigé le noir complet sur le plateau ainsi que la présence constante de sa femme, Emma, pour écouter ce qu'il a à dire, loin des attentes de Malcolm. Après une vie de mensonges, Fife entend lever le voile sur ses secrets mais, sous l'effet de l'aggravation rapide de son état, sa confession ne ressemble pas à ce que lui-même avait prévu. Puissant, écorché, bouleversant, ce roman testamentaire sur les formes mouvantes de la mémoire pose la question de ce qui subsiste - de soi, des autres - lorsqu'on a passé sa vie à se dérober.