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Avec mon ami le guide de haute montagne Daniel du Lac, je suis parti de Menton au bord de la Méditerranée pour traverser les Alpes à ski, jusqu'à Trieste, en passant par l'Italie, la Suisse, l'Autriche et la Slovénie. De 2018 à 2021, à la fin de l'hiver, nous nous élevions dans la neige. Le ciel était vierge, le monde sans contours, seul l'effort décomptait les jours. Je croyais m'aventurer dans la beauté, je me diluais dans une substance. Dans le Blanc tout s'annule - espoirs et regrets. Pourquoi ai-je tant aimé errer dans la pureté ?S.T.
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« Ce qui manque furieusement à notre époque, c'est un art de vivre avec les technologies. Une faculté d'accueil et de filtre, d'empuissantement choisi et de déconnexion assumée. Des pratiques qui nous ouvrent le monde chaque fois que l'addiction rôde, un rythme d'utilisation qui ne soit pas algorithmé, une écologie de l'attention qui nous décadre et une relation aux IA qui ne soit ni brute ni soumise. »
À San Francisco, au coeur de la Silicon Valley, Alain Damasio met à l'épreuve sa pensée technocritique, dans l'idée de changer d'axe et de regard. Il arpente « le centre du monde » et se laisse traverser par un réel qui le bouleverse.
Composé de sept chroniques littéraires et d'une nouvelle de science-fiction inédite, Vallée du silicium déploie un essai technopoétique troué par des visions qui entrelacent fascination, nostalgie et espoir. Du siège d'Apple aux quartiers dévastés par la drogue, de rencontres en portraits, l'auteur interroge tour à tour la prolifération des IA, l'art de coder et les métavers, les voitures autonomes ou l'avenir de nos corps, pour en dégager une lecture politique de l'époque et nous faire pressentir ces vies étranges qui nous attendent. -
L'usure d'un monde : Une traversée de l'Iran
François-Henri Désérable
- Gallimard
- Blanche
- 4 Mai 2023
- 9782073026163
«La peur était pour le peuple iranien une compagne de chaque instant, la moitié fidèle d'une vie. Les Iraniens vivaient avec dans la bouche le goût sablonneux de la peur. Seulement, depuis la mort de Mahsa Amini, la peur était mise en sourdine : elle s'effaçait au profit du courage.» Fin 2022, au plus fort de la répression contre les manifestations qui suivent la mort de Mahsa Amini, François-Henri Désérable passe quarante jours en Iran, qu'il traverse de part en part, de Téhéran aux confins du Baloutchistan. Arrêté par les Gardiens de la révolution, sommé de quitter le pays, il en revient avec ce récit dans lequel il raconte l'usure d'un monde : celui d'une République islamique aux abois, qui réprime dans le sang les aspirations de son peuple.
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Terrasses ou Notre long baiser si longtemps retardé
Laurent Gaudé
- Actes Sud
- Litterature De Langue Francaise
- 10 Avril 2024
- 9782330189143
Vendredi 13 novembre 2015. Douceur automnale : ce soir pourrait avoir un air de fête. On rêve de ce que sera cette nuit qui s'ouvre. Deux amoureuses savourent l'impatience de se retrouver ; des jumelles se sont demandé où célébrer leur anniversaire ; une infirmière se promet le repos mérité. Un mari s'agace de devoir garder seul «la petite» - sa femme part écouter de la musique. Partout dans Paris, on va bavarder, trinquer, rire, danser. Et du côté des forces de secours et de l'ordre, rien n'annonce l'horreur imminente.
Chant polyphonique, élégie narrative, «Terrasses» porte la parole de ceux qui ont vécu la joie puis la terreur, restitue les gestes, les regards échangés, la sidération partagée, offre à tous la possibilité d'un avant l'«après», dont le temps érode l'impossible oubli. -
Je ne suis pas l'ami d'André Chaix, et aurais-je d'ailleurs su l'être, moi que presque rien ne relie à lui ? Juste un nom sur le mur. Chaix était un résistant, un maquisard, un jeune homme à la vie brève comme il y en eut beaucoup. Je ne savais rien de lui. J'ai posé des questions, j'ai recueilli des fragments d'une mémoire collective, j'ai un peu appris qui il était. Dans cette enquête, beaucoup m'a été donné par chance, presque par miracle, et j'ai vite su que j'aimerais raconter André Chaix. Sans doute, toutes les vies sont romanesques. Certaines plus que d'autres. Quatre-vingts années ont passé depuis sa mort. Mais à regarder le monde tel qu'il va, je ne doute pas qu'il faille toujours parler de l'Occupation, de la collaboration et du fascisme, du rejet de l'autre jusqu'à sa destruction. Ce livre donne la parole aux idéaux pour lesquels il est mort et questionne notre nature profonde, ce désir d'appartenir à plus grand que nous, qui conduit au meilleur et au pire. H. L. T.
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Cette femme qui nous regarde : Angela Davis, l'Amérique et moi
Alain Mabanckou
- Robert Laffont
- 29 Août 2024
- 9782221253878
- Rentrée littéraire 2024 -
Angela Davis, l'Amérique et moi.
Le destin d'Alain Mabanckou est singulièrement lié à celui d'Angela Davis. Enfant, il voyait l'autobiographie de la militante américaine trôner dans la bibliothèque familiale, au Congo. Le visage d'Angela Davis sur la couverture le regardait déjà. Depuis, il partage le combat inlassable qu'elle mène contre le racisme et pour les droits civiques aux États-Unis.
Un jour, leurs chemins se croisent. La " rencontre " a enfin lieu. Pour Alain Mabanckou, c'est une révélation. Plus jamais il ne considèrera de la même manière son pays d'adoption, les États-Unis. Désormais, il retourne en France et au Congo avec la conviction de la fraternité chevillée au corps.
Dans un récit vibrant, où réalité et fiction se répondent, l'auteur de Mémoires de porc-épic et de Rumeurs d'Amérique offre le portrait sensible d'une des femmes les plus importantes de notre époque. -
L'été venait de commencer quand je partis chercher les fées sur la côte atlantique. Je ne crois pas à leur existence. Aucune fille-libellule ne volette en tutu au-dessus des fontaines. C'est dommage : les yeux de l'homme moderne ne captent plus de fantasmagories. Au XIIe siècle, le moindre pâtre cheminait au milieu des fantômes. On vivait dans les visions. Un Belge pâle (et très oublié), Maeterlinck, avait dit : « C'est bien curieux les hommes... Depuis la mort des fées, ils n'y voient plus du tout et ne s'en doutent point. » Le mot fée signifie autre chose. C'est une qualité du réel révélée par une disposition du regard. Il y a une façon d'attraper le monde et d'y déceler le miracle de l'immémorial et de la perfection. Le reflet revenu du soleil sur la mer, le froissement du vent dans les feuilles d'un hêtre, le sang sur la neige et la rosée perlant sur une fourrure de mustélidé : là sont les fées.
Elles apparaissent parce qu'on regarde la nature avec déférence. Soudain, un signal. La beauté d'une forme éclate. Je donne le nom de fée à ce jaillissement.
Les promontoires de la Galice, de la Bretagne, de la Cornouailles, du pays de Galles, de l'île de Man, de l'Irlande et de l'Écosse dessinaient un arc. Par voie de mer j'allais relier les miettes de ce déchiquètement. En équilibre sur cette courbe, on était certain de capter le surgissement du merveilleux.
Puisque la nuit était tombée sur ce monde de machines et de banquiers, je me donnais trois mois pour essayer d'y voir. Je partais. Avec les fées. -
Quarante ans après la mort de son oncle Désiré, Anthony Passeron décide d'interroger le passé familial. Évoquant l'ascension de ses grands-parents devenus bouchers pendant les Trente Glorieuses, puis le fossé grandissant apparu entre eux et la génération de leurs enfants, il croise deux histoires : celle de l'apparition du sida dans une famille de l'arrière-pays niçois - la sienne - et celle de la lutte contre la maladie dans les hôpitaux français et américains.
Dans la lignée d'Annie Ernaux ou de Didier Éribon, Anthony Passeron mêle enquête sociologique et histoire intime. Dans ce roman de filiation, il évoque la solitude des familles à une époque où la méconnaissance du virus était totale, le déni écrasant, et le malade considéré comme un paria. -
« On est le 6 décembre 2018, il est midi. Trois semaines que le mouvement a démarré, avec l'impression, ici, que tout ne fait que commencer ».
Qu'avons-nous traversé ces huit dernières années ?
De la révolte des Gilets jaunes à la vie quotidienne en Ukraine sous les bombes, en passant par le grand confinement, la virée en Thaïlande de deux cousins de région parisienne ou la fin tragique d'un éleveur tué par des gendarmes, Florence Aubenas raconte notre époque, au plus près du réel.
Florence Aubenas est grand reporter au journal Le Monde. Elle a notamment publié Le Quai de Ouistreham et L'Inconnu de la poste, qui ont connu un immense succès critique et public. -
«Je connais peu d'images aussi frappantes que celle par laquelle Nabokov décrit le départ d'un train : ce sont les wagons qui reculent le long du quai. Quant à la destination, elle n'est jamais celle qu'on a entrevue, en esprit, au moment de s'en aller.» François Sureau n'a jamais cessé de rechercher la compagnie bienfaisante de ceux qui, comme lui, ont été habités par le désir de s'en aller ; de Victor Hugo, fuyant la politique à Guernesey, à Philby père et fils fuyant la loyauté nationale, en passant par Patrick Leigh Fermor et sa soif d'éprouver la mystérieuse unité du monde. À travers leurs voyages, l'auteur revoit certains moments de sa vie : la Hongrie au moment de la chute du Mur, l'Inde et l'Himalaya, la guerre en Yougoslavie. Dans ce récit, l'écrivain poursuit avec éclat sa méditation sur la beauté de l'aventure.
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Les Enfants de sainte Marguerite
Ante Tomic
- Noir Sur Blanc
- La Bibliotheque De Dimitri
- 22 Août 2024
- 9782889830466
Après avoir exploré, dans ses deux précédents ouvrages, les territoires sauvages de l'arrière-pays dalmate, Ante Tomic nous offre avec ce nouveau roman une fine description de la population insulaire adriatique. On y rencontre un commandant de police entreprenant, qui a aménagé ses cellules en chambres d'hôtes, un professeur de philosophie galant, qui démontre que les cevapcici, ou kebabs selon les régions, sont à la source de la culture méditerranéenne, un migrant syrien beau comme un dieu, centre de toutes les attentions du beau sexe, et un âne mythologique et fripon, qui brait à chaque fois qu'un couple fait la bête à deux dos.
Histoire rocambolesque et drolatique émaillée de rebondissements improbables, hommage à sainte Marguerite, dernier recours des couples infertiles, mais en premier lieu merveilleux roman d'amour qui, comme tous les livres d'Ante Tomic, réconcilie le lecteur avec l'humanité, Les Enfants de sainte Marguerite nous plonge dans l'univers malicieux et bienveillant d'un auteur qui a su, tout le long de son oeuvre, gagner un public fidèle de plus en plus nombreux. -
" J'ai eu la chance et la malchance de naître pendant la guerre, or les enfants nés dans une guerre sont particulièrement attentifs au malheur et à la difficulté de la vie. Je me souviens très bien des bombardements, ma mère, ma grand-mère, mon frère et moi vivions à Nice à cette époque-là.
Mon père était médecin en Afrique. Nous étions séparés par la guerre. Il était né sur l'île Maurice qui appartenait à l'empire britannique. Il avait été expédié au Nigeria. Du côté de ma mère aussi, ils étaient mauriciens, ils étaient venus s'installer à Paris. Dans cette famille, on est alternativement prospères puis ruinés, on vient de pays différents mais on garde quelque chose en commun, j'y vois une espèce de goût pour l'aventure et une attirance pour ce qu'on peut apprendre en voyageant.
Je descends donc de toutes ces origines et je crois que j'ai hérité de ces traits familiaux. Mon identité est là : c'est une identité nomade. "
J. M. G. Le Clézio -
Au petit matin du 7 octobre, quand ils sont réveillés par le sifflement des missiles, Amir Tibon et son épouse vivent dans le kibboutz Nahal Oz depuis plusieurs années et ils connaissent les règles : il suffit de se précipiter dans la pièce sécurisée de la maison et d'attendre que la situation se calme. Mais ce samedi-là, quand ils se rendent compte qu'il ne s'agit pas seulement d'une attaque de mortier, et que des terroristes du Hamas ont envahi leur communauté, ils comprennent que la journée sera différente de toutes les autres alertes qu'ils ont connues.
Amir Tibon fait le récit des onze heures qui suivent avec une simplicité poignante: il faut tout d'abord calmer leurs deux filles, âgées de trois ans et de vingt mois. Communiquer avec les autres membres du kibboutz. Joindre les proches à Tel-Aviv. Ne pas paniquer quand on crible la maison de balles. Rester calme même quand on apprend les massacres commis dans le voisinage immédiat. Des atrocités dont Amir et sa femme deviennent aussi des témoins auditifs.
Les Portes de Gaza, cependant, ne nous offre pas seulement ce récit profondément personnel de la journée du 7 octobre, car, en alternance avec son témoignage, Amir Tibon condense ici son analyse du conflit israélo-palestinien, notamment par le prisme de l'histoire du kibboutz Nahal Oz qui devait fêter ses soixante-dix ans justement le soir du 7 octobre. Son analyse de la faillite à la fois sécuritaire et morale des années de gouvernance Netanyahou est aussi implacable et précise que sa connaissance des enjeux géopolitiques est vaste et limpide. -
Que ce soit doux pour les vivants
Lydia Flem
- Seuil
- La Librairie Du Xxie Siecle
- 13 Septembre 2024
- 9782021568516
« Il y a vingt ans, j'écrivais Comment j'ai vidé la maison de mes parents dans un mouvement d'urgence. J'avais besoin de trouver des mots pour raconter ce deuil concret, intime et déchirant, qui éveille tant de sentiments contradictoires, si souvent tus.
Que devient le deuil après le deuil ?
Aujourd'hui, vingt ans après, je me demande s'il ne règne pas un terrible silence social sur ce qui se poursuit tout au long de la vie en notre for intérieur. La société prescrit la nécessité de se détacher de la personne perdue, comme si tout le deuil se résumait à cette acceptation. Cette idée banale éclipse la part la plus fondamentale, la plus créatrice, la plus vivifiante du deuil : nouer des liens de continuité avec nos bien-aimés disparus, les garder vivants en nous, porteurs d'élans et de souffles nouveaux.
Ce deuil au long cours, ce deuil sans fin, nimbé de tendresse et d'émotions, on pourrait le nommer : le doux deuil. »
Lydia Flem -
Paris, Musée du XXIe siècle - Le 18e arrondissement
Thomas Clerc
- Éditions de Minuit
- Roman Francais Minuit
- 29 Août 2024
- 9782707355362
Le 18e arrondissement compte 425 rues, squares, places, avenues, cités, jardins, villas, boulevards, impasses et passages que Thomas Clerc a entrepris d'arpenter depuis qu'il y a emménagé récemment. Description totale, née de ses déambulations, dérives et notations, ce livre n'omet rien de ce que la ville laisse voir, entendre et ressentir.
De Montmartre aux abords du périphérique, des habitants de ses quartiers aux touristes égarés, des cafés aux dark stores, de la nuit au jour, l'ancien faubourg de Paris, insurgé sous la Commune, ne cesse de changer d'apparence, quand ce n'est l'auteur lui-même qui le refaçonne au gré de son périple. Le 18e se déroule comme une toile géante où chaque rue est un tableau vivant. -
Ne réveille pas les enfants
Ariane Chemin
- Éditions du sous-sol
- Feuilleton Non Fiction
- 1 Septembre 2023
- 9782364684805
La soeur jumelle. Puis la mère. Puis la petite fille. Puis le fils adolescent, et enfin le père. Le 24 mars 2022 une famille française se jette du septième étage de son balcon, face au lac Léman, à Montreux, en Suisse.
«Suicide collectif», concluent presque aussitôt les enquêteurs, malgré la présence de deux enfants mineurs. Un an plus tard, le dossier est clos. Les autorités ont posé une chape sur le «mystère de Montreux», un peu comme soixante ans plus tôt un cercueil fut scellé sans autre forme de procès sur le corps du grand-père des jumelles, l'écrivain Mouloud Feraoun, assassiné par l'OAS aux derniers jours de la guerre d'Algérie.
Quel scénario s'est imposé à cette famille lorsque la police a frappé à sa porte ? D'où lui vient sa «grande méfiance à l'égard de l'État» ? Pourquoi faudrait-il laisser à cette tragédie sa «part de mystère», comme l'enjoint le commissaire qui commente l'affaire ? Peut-on relier des morts par-delà les pays et les sépultures ? -
Neuf récits composent La frontière des oubliés et retracent le parcours de l'écrivaine, depuis sa fuite, enfant, de la frontière afghane pour se bâtir une vie à Téhéran. Dans chacune de ces vignettes de vie qui se font écho, elle brosse le portrait de ses compatriotes exilés, des «frontaliers», souvent des femmes, qui portent tous des traces de la guerre, des plaies profondes marquées par des balles invisibles. À chaque rencontre, elle s'interroge sur la violence, l'exil et l'identité. En s'imprégnant de son propre vécu, Aliyeh Ataei embrasse ici plus largement le sort de tous ceux qui ont hérité des «chromosomes-douleurs», se faisant l'écho de leurs voix si peu audibles.La frontière des oubliés nous fait découvrir une nouvelle plume puissante venue d'Iran. De son style clair et tranchant, Aliyeh Ataei dévoile des vérités qui secouent, et bouleversent.
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Tombeaux : autobiographie de ma famille
Annette Wieviorka
- Seuil
- Fiction Et Cie
- 2 Septembre 2022
- 9782021478181
Lors du décès d'une tante sans descendance, Annette Wieviorka réfléchit aux traces laissées par tous les êtres disparus qui constituent sa famille, une famille juive malmenée par l'Histoire. Il y a le côté Wieviorka et le côté Perelman. Wolf, l'intellectuel yiddish précaire, et Chaskiel, le tailleur taiseux. L'un écrit, l'autre coud. Ils sont arrivés à Paris au début des années 1920, en provenance de Pologne. Leurs femmes, Hawa et Guitele, assument la vie matérielle et celle de leurs enfants.
Dans un récit en forme de tombeaux de papier qui font oeuvre de sépultures, l'historienne adopte un ton personnel, voire intime, et plonge dans les archives, les généalogies, les souvenirs directs ou indirects. Par ces vies et ces destins recueillis, on traverse un siècle cabossé, puis tragique : d'abord la difficile installation de ces immigrés, la pauvreté, les années politiques, l'engagement communiste ou socialiste, le rapport complexe à la religion et à la judéité, puis la guerre, les rafles, la fuite ou la déportation - Paris, Nice, la Suisse, Auschwitz - et enfin, pour certains, le difficile retour à la vie marqué par un autre drame.
Tout l'art consiste ici à placer le lecteur à hauteur d'hommes et de femmes désireux de bonheur, de joie, de liberté, bientôt confrontés à l'impensable, à l'imprévisible, sans certitudes ni connaissances fiables au moment de faire des choix pourtant décisifs. C'est ainsi que des personnages très attachants et un monde disparu retrouvent vie, par la grâce d'une écriture sensible et précise. -
« Marcher là-bas, où tout a commencé. » Après La Nuit de feu, où Éric-Emmanuel Schmitt décrivait son expérience mystique dans le désert du Hoggar, il revient aux sources avec ce récit de voyage en Terre sainte, territoire aux mille empreintes. Bethléem, Nazareth, Césarée, lieux intenses et cosmopolites qu'il saisit sur le vif tout en approfondissant son expérience spirituelle, ses interrogations, réflexions, sensations, étonnements jusqu'à la surprise finale, à Jérusalem, d'une rencontre inouïe avec ce qu'il nomme « L'incompréhensible ».
Dramaturge, romancier, nouvelliste, essayiste, cinéaste, traduit en 48 langues et joué dans plus de 50 pays, Éric-Emmanuel Schmitt est un des auteurs les plus lus et les plus représentés dans le monde. Membre depuis 2016 de l'académie Goncourt, il prolonge ici sa réflexion sur la foi, inaugurée avec La Nuit de feu (2015). " L'auteur nous livre ici une expérience spirituelle unique et inoubliable." Biblioteca -
L'absence est une femme aux cheveux noirs
Emilienne Malfatto, Rafael Roa
- Editions Du Sous Sol
- 5 Avril 2024
- 9782364687738
C'est un pays qui veut et qui ne veut pas se souvenir. Ce sont les fantômes de la dictature et les noyés d'un fleuve mensonger. C'est la recherche d'une forme de vérité et d'une mémoire fuyante dans les rues de Buenos Aires et dans les villes argentines où trente mille personnes ont disparu lors de la dernière dictature (1976-1983), et où des centaines d'enfants furent volés par les militaires pour éradiquer le «gène rouge».
Quarante ans après le retour de la démocratie, dans un pays qui vient de voter contre lui-même, il manque encore des gens en Argentine. Les disparus le sont toujours. Les familles attendent. Certaines personnes ignorent qui elles sont réellement. Dans ce flou permanent, une femme, la narratrice, cherche à percevoir des fragments de cette mémoire voilée et volée sur une terre où, peut-être, s'est jouée une partie de sa propre histoire familiale.
L'absence est une femme aux cheveux noirs est fait d'images de flou et d'ombres, des photographies comme des éclairs de songes, et un texte fragmenté, comme des trous de mémoire, comme un monologue qui parfois s'emballe et devient fou. Et où, pourtant, tout est vrai.
Une déambulation littéraire et visuelle puissante, où les stigmates du passé se réveillent au contact d'un présent terrible. -
De Pitchik à Pitchouk : Un conte pour vieux enfants
Jean-Claude Grumberg
- Seuil
- La Librairie Du Xxie Siecle
- 7 Avril 2023
- 9782021529715
« Vous est-il déjà arrivé un soir de réveillon de croiser le père Noël égaré dans votre propre cheminée ? Ou vous êtes-vous déjà endormi dans votre petit lit douillet et réveillé quelque part entre Pitchik et Pitchouk étoilé et numéroté ? Non ? Alors réjouissez-vous car ce conte est pour vous.
Une très vieille personne - de mon âge, c'est tout dire - me confia sous le sceau du secret la recette de ce conte de Noël à déguster chaud ou froid, été comme hiver, avec un jus de citron ou un verre de vodka, seul ou avec la terre entière, à l'hosto ou chez soi près de sa cheminée Napoléon III. » Une vieille dame indigne, Rosette Rosenfeld, un soir de Noël et au soir de sa vie, passant une tête par sa cheminée Napoléon III, croise celui qu'elle espérait y rencontrer : le père Noël, membre des Pères Noël associés et... au bord du burn-out. De l'Ehpad - où les desserts sont bios et déchocolatés - qui finit par l'accueillir, aux songes nocturnes dans lesquels elle croise son mari disparu et ancien déporté, et ses beaux-parents venus pour l'un de Pitchik, pour l'autre de Pitchouk, Jean-Claude Grumberg nous invite à suivre ses tribulations, toujours à l'ombre de l'histoire et de sa grande hache, prêtant à ce conte de Noël sa plume burlesque et pleine d'humour, jusqu'à ce qu'entre deux rires l'émotion saisisse le lecteur à la gorge. -
Un endroit inconvénient
Jonathan Littell, Antoine d' Agata
- Gallimard
- Blanche
- 29 Septembre 2023
- 9782073036841
Photographies d'Antoine d'Agata
-
Le Grand Tour : autoportrait de l'Europe par ses écrivains
Olivier Guez, Collectif
- Grasset
- 2 Mars 2022
- 9782246830474
Au dix-huitième siècle, le Grand Tour menait les jeunes aristocrates du nord de l'Europe vers les rivages méditerranéens. Ils allaient parfaire leur éducation et leur connaissance des Humanités. Notre Grand tour, plus modestement, vagabonde dans l'imaginaire européen et invite ses lecteurs aux voyages en montant à bord d'un Trans-Europ-Express utopique - les trains reviennent à la mode, dit-on. Il conte des destins, des villes et des paysages. Il ausculte l'Europe d'aujourd'hui. Il remonte souvent dans le temps, nous sommes un vieux continent. Il présente un panorama inédit de la littérature européenne contemporaine, un autoportrait de l'Europe par ses écrivains, parmi les meilleurs du continent.
O.G.
A l'occasion de la présidence française de l'Union Européenne, Olivier Guez a demandé à vingt-sept écrivains, un par Etat-membre, d'écrire sur des lieux évocateurs de la culture et de l'histoire européennes. Dans les récits et les nouvelles inédits qui composent ce recueil exceptionnel, les mémoires, les regards et les climats d'une Europe de chair et de sang s'entrecroisent. Il ébauche une carte émouvante de l'esprit européen du début des années vingt du vingt-et-unième siècle.
Les contributeurs de l'anthologie sont : Daniel Kehlmann (Allemagne), Eva Menasse (Autriche), Lize Spitz (Belgique), Kapka Kassabova (Bulgarie), Stavros Christodoulou (Chypre), Olja Savicevic (Croatie), Jens Christian Grondahl (Danemark), Fernando Aramburu (Espagne), Tiit Aleksjev (Estonie), Sofi Oksanen (Finlande), Maylis de Kerangal (France), Ersi Sotiropoulos (Grèce), Laszlo Krasznahorkai (Hongrie), Colm Toibin (Irlande), Rosella Postorino (Italie), Janis Jonevs (Lettonie), Tomas Venclova (Lituanie), Jean Portante (Luxembourg), Imannuel Mifsud (Malte), Jan Brokken (Pays-Bas), Agata Tuczynska (Pologne), Lidia Jorge (Portugal), Norman Manea (Roumanie), Michal Hvorecky (Slovaquie), Brina Svit (Slovénie), Bjorn Larsson (Suède), et Katerina Tuckova (République tchèque).
Textes réunis et préfacés par Olivier Guez. -
Cet ouvrage est d'abord l'histoire d'une découverte : au cours de ses recherches pour son roman Les Services compétents - dans lequel il raconte l'arrestation en 1965 de son père Andreï Siniavski, dissident soviétique -, Iegor Gran met la main sur un document inespéré : Le Recrutement des agents. Un livre russe daté de 1969, numéroté, imprimé à cent exemplaires. Sa fonction ? Enseigner aux jeunes recrues du KGB l'art subtil du recrutement des agents de renseignement étrangers.
Iegor Gran nous accompagne dans la lecture de ce manuel qu'il a lui-même traduit. Sa voix, entrelacée dans le texte original, nous apporte les éléments de contexte nécessaires : comment entre-t-on dans une école du KGB, qu'y fait-on, comment se déroulent les examens, etc. ? En parallèle, il évoque l'aventure personnelle que représente pour lui la plongée dans cette traduction, ses éclats de rire et ses dégoûts, la proximité que l'on peut avoir avec ce document,l'étrange effet hypnotique qu'il produit.
Convaincre ou contraindre : voilà ce qu'apprend l'officier du KGB. De l'identification de la « piste » au recrutement lui-même, le protocole est très strict, mais l'officier est aussi invité à faire preuve de créativité. Une progression s'installe, une intrigue, presque, avec comme point culminant la « conversation de recrutement ».
On oscille de l'ultra concret au très vaste projet social et politique. On passe du conseil de bienséance - ne pas boire exagérément pendant un recrutement - aux astuces de surveillance, filature, chantage et organisation, le tout incarné par une multitude d'exemples : Thomson, le facteur ; Harley, représentant chez Philips ; Verdi, artiste critique envers la politique américaine ; Fée, dactylo au sein d'une mission diplomatique...
Ce manuel n'est pas seulement une machine à voyager dans le temps. C'est une relique échappée d'un lieu obscur, un sauf-conduit vers un donjon inaccessible au simple mortel. Et un outil, aussi, pour comprendre la Russie d'aujourd'hui.