« Je me suis réveillé un matin, et les Dieux de la mythologie grecque étaient revenus parmi nous... ».
Portés par le souffle de l'Iliade et de l'Odyssée, les premiers pas en littérature d'un dessinateur culte. Savant, hilarant et fantaisiste : un miroir ironique tendu à notre époque désorientée.
De livre en livre, Ivan Jablonka ouvre des voies nouvelles. Avec une audace et une créativité peu communes, il invente ses sujets et ses formes. Après Laëtitia, après En camping-car, il explore sa « garçonnité » dans les années 1970-1980, s'interrogeant sur le « nous-garçons » et les frontières incertaines entre masculin et féminin.
De sa famille au service militaire en passant par l'école, il raconte sa formation au fil d'une enquête souvent poignante, parfois drôle - toujours passionnante - où beaucoup pourront se reconnaître. Car cette « autobiographie de genre » dévoile une intimité à la fois individuelle, sociale et politique : l'histoire d'une génération. Avec une honnêteté troublante, Ivan Jablonka analyse le « malaise dans le masculin » qui fut le sien, restituant le vif et l'éclat de l'enfance dans ses enthousiasmes, ses émois et ses peines.
Il existe depuis toujours des Journaux de voyage, de rêve, de deuil, mais pas de nage. Pourtant, quoi de plus fragile et puissant, éphémère et total, sensuel et inspirant que le plaisir du bain ? En tenant le Journal de son été 2021 à Nice, Chantal Thomas innove, et poursuit l'entreprise paradoxale entamée avec Souvenirs de la marée basse, portrait de sa mère en nageuse : doter d'une mémoire ce qui, se traçant sur l'eau, se jouant dans un effet de lumière, est voué à l'effacement.
« Comme sont loin de moi par exemple les muscles de mes bras. » Cette phrase de Kafka, véritable fil conducteur, a été le déclic à partir duquel il lui a semblé essentiel, au sortir du confinement, de célébrer le chemin flottant d'un retour à soi, d'une harmonie retrouvée avec son corps et avec le monde.
Retraçant les vies passées et présentes des habitants d'un immeuble du Xe arrondissement de Paris, Ruth Zylberman livre un magnifique récit. Là se sont succédé, depuis les années 1850 jusqu'à nos jours, des générations d'enfants, d'artisans et d'ouvriers, d'immigrés de l'est ou du sud de l'Europe. Là se sont noués des amours, des amitiés, des tragédies. Là, l'ordinaire du quotidien a côtoyé l'extraordinaire du fait divers et des violences de l'Histoire. Ruth Zylberman propose une réflexion bouleversante sur les traces du passé, les lieux où se loge la mémoire et le lien invisible entre les vivants et les morts. Car cette autobiographie d'un immeuble est aussi une forme d'écriture de soi.
« Nous autres du 209, les pauvres, les morts et les vivants, les disparus et les revenants, nous autres les communards et les artisans, les résistants et les dénonciateurs, nous autres les jeunes filles amoureuses et femmes de mauvaise vie, nous autres les Kabyles et les Polonais, les Juifs, les Portugais et les Bretons, les Marocains et les Italiens, nous autres, Odette, Albert, Daniel, Henry, Charles et les autres.«Nous autres du 209», c'était la forte et fière affirmation d'une patrie imaginaire dont l'étendard serait ce toit de ciel découpé en carré au-dessus de la cour. »
Un homme n'est pas tout à fait un homme, ni une femme tout à fait une femme. Les sexes ne sont pas des camps, ni des rives opposées. Les sexes passent l'un au travers de l'autre dans une nuit où les corps échappent aux attributs censés répartir les forces, les symboles, les fonctions ou les rôles.
Dans La Nuit des rois, Shakespeare célèbre la nuit carnavalesque des grands retournements. Toutes les évidences tombent. Surgissent d'autres vérités dont l'éclat trouble les miroirs. Hantise des puritains : que tout se réunisse, se mêle, se confonde, s'inverse. » Denis Podalydès.
Dans ce livre, Denis Podalydès mêle la vie intime au travail de l'acteur : moments de joie, de sérénité se trament avec la solitude, le vide, le trac, l'angoisse, et les instants de comédie... Il dit son admiration au metteur en scène Thomas Ostermeier. L'expérience des répétitions permet aux lecteurs de découvrir les coulisses d'un théâtre qui est la vie même.
« Rabat, Maroc, deuxième semaine d'automne.
Hier j'ai assisté, pour la première fois, à une transaction commerciale concernant le temps. Ou plutôt, j'ai perçu, je crois, un échange de ce genre dans une petite boutique, une échoppe sur le versant occidental de la Médina où l'on arrive par la rue des Consuls ; je fais allusion par là à ma sensation personnelle d'avoir assisté à un événement simple, celui d'un homme qui vendait du temps à un autre homme. » Le narrateur reste hanté par cette scène, et, de Rabat à Stavanger, en Norvège, il part à la recherche d'une explication. Y-a-t-il réellement un commerce du temps et quelles sont les personnes qui le pratiquent ?