Picquier
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Avec la délicatesse d'écriture que nous lui connaissons dans ses précédents romans, Ogawa Ito nous entraîne dans une réflexion sur l'approche de la mort. Le lion du titre désigne les pensionnaires de la « Maison du lion », un centre de soins palliatifs sur l'île aux citrons, dans la mer intérieure du Japon ; chacun des « hôtes » est invité, à la manière des lions, à sortir de la vie en convive rassasié et dans la plus grande liberté. Le goûter est celui du dimanche où l'on sert un mets parmi ceux que les hôtes souhaitent savourer une dernière fois dans leur vie. On y partage des gâteaux, ses peurs et ses petits bonheurs pour attendre sa propre mort avec sagesse et sérénité. Une lecture émouvante et un roman plein d'espoir dans lequel la plume d'Ogawa garde sa finesse et son humour.
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Avant de devenir le célèbre dessin animé de Takahata Isao, La Tombe des lucioles est une oeuvre magnifique et poignante de l'écrivain Nosaka Akiyuki. L'histoire d'un frère et d'une soeur qui s'aiment et vagabondent dans l'enfer des incendies tandis que la guerre fait rage ; une histoire qui est celle que Nosaka vécut lui-même, âgé de quatorze ans, en juin 1945. Mais Nosaka, c'est aussi un style inimitable, une écriture luxuriante que l'on reconnaît d'abord à son brassage de toutes sortes de voix et de langues.
Une prose étonnante, ample, longue, qui réussit à, concentrer en une seule phrase des couleurs, odeurs et dialogues, secouée de mots d'argot, d'expressions crues, d'images quasi insoutenables, qui trouvent ici une beauté poétique et nouvelle.
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C'est le jeune Niannian qui raconte l'incroyable fléau qui s'est abattu sur le petit village des monts Funiu. On l'appelle l'idiot, bien qu'il ait parfois l'esprit aussi clair qu'un pan de ciel bleu, et il se sent bien en peine de raconter ce qui s'est passé. Mais voilà, leur voisin le grand écrivain Yan Lianke a vu son esprit se dessécher et son inspiration tarir, alors il faut bien que Niannian s'acquitte de cette tâche à sa place.
Niannian implore les esprits de lui venir en aide car les gens de son village ont sombré dans une épidémie de somnambulisme. Les jours se succèdent mais le soleil se refuse à poindre. Et dans cette nuit perpétuelle les hommes transgressent tout : la morale, le bon sens, les convenances, ils réalisent leurs désirs les plus secrets et se livrent à la violence. Faut-il voir ce monde insensé comme une allégorie de la réalité ? C'est un roman à la puissance visionnaire et à l'humour dévastateur qui vous empoigne et vous emporte tout frissonnant dans sa nuit de cauchemar.
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Partir à la découverte de Tokyo, le nez au ras du trottoir et l'oeil à l'affût, arpenter le bitume à hauteur d'homme et saisir les instants fugitifs, saugrenus et si caractéristiques dans leur étrangeté de la capitale du Japon. Avec pour seuls outils et compagnons les plus fidèles, une bicyclette, une chaise pliante de pêcheur, et bien sûr des crayons de couleur.
Voici un guide de voyage dans Tokyo qui ne ressemble à aucun autre, le premier livre d'un jeune auteur d'une vingtaine d'années, promis à un très bel avenir vu son talent pour capter en quelques traits l'âme d'une ville, ses habitants, le petit peuple animal des parcs, les fruits et les noms des voitures, les vêtements, les temples et les rencontres inattendues. Chaque chapitre s'organise autour d'un quartier, avec sa carte et son koban, autrement dit son commissariat, aux architectures plutôt délirantes. Autant dire qu'on peut à la fois se retrouver et se perdre, rire, c'est certain car les commentaires sont extrêmement drôles, et se laisser entraîner dans un Tokyo surprenant au gré d'une humeur vagabonde et d'un esprit curieux.
Il ne s'agit ni d'un carnet de voyage, ni d'un guide, ni d'une BD, ni d'un journal, mais d'un peu tout ça à la fois.
« J'évoque mon séjour de 6 mois à Tokyo (juin à décembre 2006) à travers des dessins quotidiens dont les sujets varient entre le décor, les gens, les moeurs et les anecdotes personnelles. Ces dessins sont regroupés, dans l'ouvrage, par quartiers que je situe sur différentes cartes. Le sommaire du livre est d'ailleurs lui-même une carte générale de Tokyo, de sorte que la lecture des différents chapitres donnent l'impression d'un zoom dans la ville, d'un changement d'échelle progressif. Ca c'est le côté « guide ». Mais, comme chacun sait, Tokyo est une grande ville, et je n'ai pas en pu dessiner toutes les rues. Les quartiers, les décors et les situations dans ce livre me concernent donc directement et rendent comptent de mes pérégrinations un peu aléatoires dans la ville. Et ça c'est le côté « carnet de voyage ».
L'objet de cet ouvrage n'est pas de présenter Tokyo d'une manière exhaustive, mais plutôt d'en décrire l'ambiance. »
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C'est un texte qui exprime, pour le public occidental, cette esthétique du clair-obscur et du presque rien, du subtil et de l'ambigu, opposée au tout blanc ou noir, au facial écrasé de lumière rationaliste de l'Occident. La traduction des années 1970 toute au louable projet de légitimer le goût de l'esthétique japonaise, avait un peu laissé dans l'ombre sa face scintillante et ironique. Tout comme il n'y a pas d'ombre sans lumière, il n'y a pas de vérité sérieuse sans humour.
Et vous pouvez faire confiance à Tanizaki quand il s'agit de marcher sur le fil de la vulgarité sans tomber dedans, comme de scruter l'ombre sans se cogner la tête. Les idées défendues dans cet essai rejoignent des préoccupations contemporaines de recherche d'une vie plus frugale et parcimonieuse en énergie.
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La traversée des sangliers
Guixing Zhang
- Picquier
- Litterature Grand Format
- 6 Janvier 2022
- 9782809715736
Le récit a pour toile de fond l'invasion japonaise dans la province de Sarawak, ses jungles, ses animaux, ses habitants et leurs coutumes.
Dans une langue virtuose, le roman raconte cet épisode historique à travers une galerie de personnages hauts en couleurs : les villageois, chasseurs et fumeurs d'opium, qui résistent à l'envahisseur : Kwan A-hung qui, ayant perdu ses deux bras, finit par se pendre en attachant la corde avec ses pieds, Guan la face rouge, le vieux chasseur tatoué Daddy Chou, Plat-Pif, Emily, une orpheline anglaise, la vieille sorcière Mapopo, Tortue Molle, Tsing le Biscornu, Lolo Brioche et bien d'autres encore.
Le lecteur se trouve plongé dans une atmosphère luxuriante de réalisme magique où la magie opère dans la jungle sous l'oeil des alligators.
Un roman magistral.
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Poète, calligraphe, peintre, universitaire érudit de renom, CHEN Lemin (1930-2008) a fait partie de ces intellectuels chinois d'une très grande originalité qui ont bénéficié de façon exceptionnelle d'une double éducation. Ils avaient un pied dans la tradition chinoise et un pied dans une modernité occidentale : sa longue fréquentation de l'Occident l'a plus durablement rapproché de Kant que de Confucius. Sa main, celle qui tient le pinceau reste pourtant une main chinoise qui obéit au coeur et au souffle et les nombreuses oeuvres présentées dans ce livre sont des témoignages de cette culture chinoise : poèmes , peintures et calligraphies attestent aussi des exigences d'un homme pour qui la peinture était un véritable exercice spirituel.
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Contes d'une grand-mère vietnamienne ; contes et légendes d'Asie
Yveline Féray
- Picquier
- Picquier Poche
- 4 Novembre 2016
- 9782809712162
Ces contes sont aussi anciens que le Viêtnam.
Ils ont volé de bouche en bouche depuis les temps immémoriaux, s'enrichissant et se modifiant au fil du temps, chaque conteur - maître d'école, chanteur ambulant, grand-mère, grande soeur - répétant ce qu'il avait entendu enfant et l'ornant de nouveaux détails au gré de son imagination et de son talent. Un trésor de récits merveilleux et de légendes extraordinaires qui s'ouvre par une version surprenante de notre Cendrillon, et ainsi de conte en conte en compagnie de rois, de princesses, de talismans ou de génies pour une magique traversée des apparences, jusqu'au dernier qui s'apparente à un grand mythe fondateur.
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Contes du conseiller de la digue
Collectif
- Picquier
- Le Pavillon Des Corps Curieux
- 28 Mars 2001
- 9782877305358
Dans la brillante capitale du Japon ancien, où l'on fait sa cour un poème à la main et où l'on se pâme devant la fragile splendeur des cerisiers en fleurs, un élégant séducteur traverse la brume en suspension dans la blancheur incertaine de l'aurore.
Un autre accorde son luth, pour le plus grand bonheur des admiratrices qui se pressent autour de lui, tandis qu'un troisième à la nuit tombante fait atteler son char en vue d'une visite galante. Ces messieurs ressemblent comme des frères à Hikaru, le Radieux personnage du Dit du Genji, que Murasaki Shikibu, dame de Cour, avait créé pour distraire ses compagnes aux alentours de l'an 1000, et qui devait devenir le héros d'un des plus grands romans de tous les temps.
Mais dans la pénombre des corridors du Palais, qui frémissent toujours de mille ragots, il semble qu'un mystérieux Conseiller s'amuse à égarer ses personnages entre deux alcôves, et à promener ses lecteurs entre le raffinement d'un âge d'or suranné et l'humour dévastateur de la parodie, qui annonce une époque nouvelle...