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Anacharsis
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Trois nuits dans la vie de Berthe Morisot
Mika Biermann
- Anacharsis
- Fictions
- 7 Janvier 2021
- 9791027904099
Voilà l'été. Berthe Morisot, peintre impressionniste, et Eugène Manet, son mari affable, quittent Paris pour une partie de campagne. Ils posent valises et chevalet dans une maison champêtre, havre d'une douceur estivale propice à toutes sortes d'expérimentations nocturnes.
Dans ce roman formant un diptyque avec Trois jours dans la vie de Paul Cézanne, Mika Biermann confond allègrement mots et couleurs, phrases et perspectives, écriture et peinture.
De ces pages, comme d'autant de toiles, surgissent des méditations corrosives sur la chair comme matière à peindre.
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Adelmo Farandola, mène une existence revêche dans la montagne. Ermite lunatique et acariâtre, il n'a pas le souvenir très lucide. Les saisons se fondent en un brouillard opaque dans sa mémoire. Mais cet hiver-là surgit un chien. Bavard. Pétulant. La truffe en éveil. Il adopte Adelmo Farandola.
Au printemps, la fonte des neiges révèle un pied humain non loin de leur cabane. Adelmo Farandola ne se souvient pas très bien des événements de l'an passé. À qui appartient ce pied ? Dans son esprit engourdi s'insinue une inquiétude croissante.
Avec Le chien, la neige, un pied, Claudio Morandini compose un conte cruel, une de ces histoires à donner le frisson qu'on se raconte le soir à la veillée.
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Beau comme l'antique ! Turpidum, la bien nommée, est la dernière cité étrusque indépendante. Larth, son roi à peine sevré, se sent un peu perdu dans son décorum fatigué. La peinture des fresques s'écaille en silence, la populace s'affaire par les ruelles au sol gras, on prépare le sable pour les jeux dans l'arène. Rome exige l'abdication du petit roi maigrichon, amateur de fruits juteux et bien arrondis. Un énigmatique gladiateur masqué fait son apparition par intervalles. La reine mère agonise au fond de son palais, pourrissant comme une gloire inutile. Matière et lumière, soleil et pénombre. Des couleurs par giclées, écrasées à la spatule. Du laurier, un cyprès, une olive, les mollets luisants des légionnaires. Un péplum total, impressionniste, le Satyricon de Mika Biermann.
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La narratrice est une jeune ethnomusicologue venue enquêter sur des chants de bergers entendus au-dessus de Crottarda, village enfoui au fond d'une vallée privée de soleil. Plongé dans une perpétuelle pénombre, il trempe dans une humidité froide et dévorante, qui n'empêche guère ses habitants de se faire facétieux, à l'occasion.
À l'arrivée des rares visiteurs, ils se donnent des allures de monstres difformes auxquelles la grisaille ambiante prête un air de réalité. D'abord bien accueillie, la jeune chercheuse va se trouver pourtant en butte à leur inexplicable hostilité. Bientôt, leurs pitreries deviennent inquiétantes, mais elle s'enfonce malgré tout dans les mystères spongieux qui enserrent Crottarda.
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La taverne du doge loredan
Alberto Ongaro
- Anacharsis
- Griffe Famagouste
- 21 Février 2019
- 9791092011739
Dans un palais fané de Venise, Schultz, éditeur au passé imprécis de capitaine de marine, mène une existence désenchantée... N'était son machiavélique alter ego du nom de Paso Doble, une femme de cire nue revêtue d'un manteau en poil de chameau reposant dans une chambre du palais, et la découverte d'un manuscrit oublié.
À la lecture de cet énigmatique ouvrage, Schultz sera projeté dans une aventure frénétique entre Londres et Venise au début du XIXe siècle, pleine de la passion fiévreuse du jeune Jacob Flint pour la volcanique Nina, patronne de La Taverne du doge Loredan et maîtresse d'un gentleman contrebandier exhalant une infâme puanteur et harcelé par deux corbeaux parlants. D'abord intrigué, Schultz est bientôt fasciné par les étranges affinités qu'il se découvre avec Jacob Flint.
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Cipriano Parodi, jeune Vénitien d'antique famille, est doté d'une imagination torrentielle d'où jaillissent des personnages échappés des plus extravagants romans d'aventures.
Après la parution de son premier ouvrage, il se voit invité à New York par le célébrissime écrivain Caspar Jacobi, monarque régnant sur la littérature populaire.
En dépit d'une funeste prophétie que lui dévoila jadis une comtesse de carnaval, Cipriano se précipite. Escorté par ses remuantes créatures, il entre au service du Maître.
Commence un jeu de dupes, un furieux combat dans l'arène de la fiction, où Cipriano va découvrir à ses dépens la puissance vampirique de la littérature.
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De retour à Venise après des mois d'exil, Francesco Sacredo découvre que son père a dilapidé leur fortune au jeu contre la comtesse borgne Mathilde von Wallenstein. Celle-ci propose au jeune homme de miser sa propre personne, corps et âme, contre le retour de ses biens. Totum ou nihil, tout ou rien, sur un seul lancer de dés. Il perd ; et aussitôt prend la fuite.
Harcelé par les spadassins de la comtesse, la mort aux trousses, il prolongera à l'infi ni cette partita contre la carnassière comtesse.
Maestro de l'art de la fiction, Alberto Ongaro convoque dans ce roman d'aventures les élégances vénéneuses de Casanova aussi bien que l'exubérance de Fellini.
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Dans La neige noire d'Oslo, Luigi Di Ruscio relate, à travers un récit où passé et présent se confondent, son quotidien de métallo, sa condition de poète et d'émigré en Norvège. Vie privée et histoire collective se téléscopent portées par un récit torrentiel qui semble ne jamais vouloir s'arrêter.
Il assume totalement ses marginalités, avec une obsession : écrire comme il l'entend et témoigner pour tous ceux dont justement la littérature ne se soucie pas (et qui ne se soucient pas d'elle) : « si je ne les écris pas mes poésies d'usine, qui d'autre au monde les écrira ? » Il est intarissable en imprécations contre le Dieu clérical qui a colonisé son enfance et sa jeunesse, le blasphème est pour lui un formidable terrain de jeu. Comme souvent, il renverse les rapports de domination: « le soussigné n'est pas croyant il est seulement cru par notre père qui est aux cieux. » Il évoque les espérances et les déceptions qu'a suscitées le communisme, dont l'héritage serait davantage une lutte toujours recommencée que l'espoir d'un nouveau système définitif : « arrêtez de faire les fétichistes, il faut refaire un essai, reprendre le labeur de Sisyphe au point le plus bas, à chaque poussée nous verrons mieux la cime des nouveaux précipices. Notre valeur se mesure à la puissance de l'opposition. » Résister à la violence du travail en usine, aux critiques ou éditeurs qui corrigent, font et défont l'histoire littéraire, à toutes les formes de « brutalisations » sociales et culturelles :
Ce que l'on retient du livre est l'histoire du combat acharné d'un homme pour sa dignité et celle de tous les autres ainsi que les manifestations « d'une joie furibonde » qui lui vient sans doute de l'incroyable cohérence entre sa vie et son oeuvre.
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Après La Neige noire d'Oslo (Anacharsis, 2014) et Palmiro (Anacharsis 2015), le cycle des écrits romanesques de Luigi Di Ruscio se clôt avec Cristi polverizzati.
C'est le roman de formation d'un déclassé en même temps qu'un témoignage sur l'Italie de la seconde guerre mondiale jusqu'aux années 1960, une époque entre fascisme, résistance et reconstruction parcourue de vagues modernisatrices aussi enthousiasmantes que dévastatrices.
Le récit, autobiographique, s'ouvre sur le choc de la naissance pour se déployer à coups de flash-back et de retours au présent de l'écriture qui questionnent inlassablement l'oeuvre en construction. Le lecteur se voit ainsi propulsé dans un texte acrobatique où se mêlent récit mémoriel, aventures fantasmagoriques et coups de gueule. Sans jamais se départir d'un regard ironique toujours démystifiant, cette oeuvre inclassable se construit par leitmotivs : Dieu, le parti communiste, les poètes, l'horreur, la vitalité physique.
Le titre renvoie à un personnage, compagnon de route du narrateur, qui vend des christs en plâtre, « pulvérisés » de faux bronze. Ces «Christs pulvérisés » évoquent aussi bien l'hypocrisie des autorités religieuses que la volonté de pulvériser toutes formes de domination par la violence de l'écriture.
Christ pulvérisés raconte ainsi l'histoire d'une seconde naissance, par l'écriture cette fois. Di Ruscio a fait de sa «mauvaise alphabétisation » une force, refuse la langue réglementaire, revendique une écriture déconstruite qui possède la vitalité et la spontanéité de l'oralité, mêlant archaïsmes, éléments dialectaux, néologismes, lapsus, erreurs orthographiques et grammaticales pleinement assumées.
Un style non prémédité propre à enfreindre toutes les règles.
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Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, dans la petite ville de Fermo, une bande loufoque de partisans, fonctionnaires, prostituées et paysans attend fébrilement la grande fête révolutionnaire et l'avènement d'une société sans classes.
Sous la forme d'une autobiographie picaresque, Luigi Di Ruscio orchestre dans sa ville natale une comédie humaine à l'italienne, peuplée de figures tour à tour burlesques, tragiques et tendres.
Armé d'une drôlerie féroce, d'une écriture à la cadence orale ponctuée de fulgurantes inventions langagières, il nous administre une formidable leçon de joie de vivre en dépit de ses désillusions politiques.