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Aliène
Phoebe Hadjimarkos clarke
- Éditions du sous-sol
- Feuilleton Fiction
- 5 Janvier 2024
- 9782364687516
Hannah n'est pas un chien comme les autres, c'est le clone d'une première Hannah, qui trône empaillée au milieu du salon. Elle suscite les peurs et les reproches muets du village, à mesure qu'on découvre au matin des animaux massacrés, et qu'elle-même rentre parfois ensanglantée.
Cette situation est le point de départ d'un récit de traque et de cauchemar délicatement progressif, la plupart du temps fantomatique. Jamais l'assaillant n'est clairement nommé, jamais la cible n'est clairement identifiée. Fauvel sait être une proie, mais de qui ? Dans le village, un groupe de chasseurs, tous ouvriers ou anciens ouvriers de l'usine d'eau minérale, peu loquaces et mal lotis par la vie, font naître les fantasmes, tantôt sexuels, tantôt horrifiques. Et plus particulièrement chez Fauvel, coupée du monde par sa conscience éparpillée, et chez Mitch, un jeune sociologue qui enquête sur les récits d'enlèvements par les extraterrestres, nombreux dans la région, surtout chez les anciens ouvriers de l'usine.
Au fil d'une pseudo-enquête hallucinée, le roman explore les notions de domination, d'animalité et de violence. À travers la proximité, voire l'amalgame entre animaux et humains, Aliène questionne la nature de ce qui est caché, la vie animale, et surtout l'instinct de peur. Tel est le véritable fil du récit, rarement traité avec autant de nuance et de force. -
Ne réveille pas les enfants
Ariane Chemin
- Éditions du sous-sol
- Feuilleton Non Fiction
- 1 Septembre 2023
- 9782364684805
La soeur jumelle. Puis la mère. Puis la petite fille. Puis le fils adolescent, et enfin le père. Le 24 mars 2022 une famille française se jette du septième étage de son balcon, face au lac Léman, à Montreux, en Suisse.
«Suicide collectif», concluent presque aussitôt les enquêteurs, malgré la présence de deux enfants mineurs. Un an plus tard, le dossier est clos. Les autorités ont posé une chape sur le «mystère de Montreux», un peu comme soixante ans plus tôt un cercueil fut scellé sans autre forme de procès sur le corps du grand-père des jumelles, l'écrivain Mouloud Feraoun, assassiné par l'OAS aux derniers jours de la guerre d'Algérie.
Quel scénario s'est imposé à cette famille lorsque la police a frappé à sa porte ? D'où lui vient sa «grande méfiance à l'égard de l'État» ? Pourquoi faudrait-il laisser à cette tragédie sa «part de mystère», comme l'enjoint le commissaire qui commente l'affaire ? Peut-on relier des morts par-delà les pays et les sépultures ? -
Mon vrai nom est Elisabeth
Adèle Yon
- Éditions du sous-sol
- Feuilleton Fiction
- 6 Février 2025
- 9782364689572
Une chercheuse craignant de devenir folle mène une enquête pour tenter de rompre le silence qui entoure la maladie de son arrière-grand-mère Elisabeth, dite Betsy, diagnostiquée schizophrène dans les années 1950. La narratrice ne dispose, sur cette femme morte avant sa naissance, que de quelques légendes familiales dont les récits fluctuent. Une vieille dame coquette qui aimait nager, bonnet de bain en caoutchouc et saut façon grenouille, dans la piscine de la propriété de vacances. Une grand-mère avec une cavité de chaque côté du front qui accusait son petit-fils de la regarder nue à travers les murs. Une maison qui prend feu. Des grossesses non désirées. C'est à peu près tout. Les enfants d'Elisabeth ne parlent jamais de leur mère entre eux et ils n'en parlent pas à leurs enfants qui n'en parlent pas à leurs petits-enfants. "C'était un nom qu'on ne prononçait pas. Maman, c'était un non-sujet. Tu peux enregistrer ça. Maman, c'était un non-sujet.'
Mon vrai nom est Elisabeth est un premier livre poignant à la lisière de différents genres : l'enquête familiale, le récit de soi, le road-trip, l'essai. À travers la voix de la narratrice, les archives et les entretiens, se déploient différentes histoires, celles du poids de l'hérédité, des violences faites aux femmes, de la psychiatrie du XXe siècle, d'une famille nombreuse et bourgeoise renfermant son lot de secrets. -
Dans cette pièce, il y a deux filles. C'est leur histoire d'amour. Leur désir de fusion. Devenir une seule. Comprendre l'autre parfaitement. Quelque chose d'impossible. Le zéro.
"tu voudrais inverser les choses jusqu'à ce qu'elle ne soient plus des choses
oui
tu voudrais que je le fasse pour toi
oui
est-ce que tu voudrais que je le fasse pour toi
oui
est-ce que tu voudrais qu'il n'y ait plus un chemin de la naissance à la mort
oui
tu veux la guérison pour tout ce qui existe
oui' -
L'absence est une femme aux cheveux noirs
Emilienne Malfatto, Rafael Roa
- Éditions du sous-sol
- 5 Avril 2024
- 9782364687738
C'est un pays qui veut et qui ne veut pas se souvenir. Ce sont les fantômes de la dictature et les noyés d'un fleuve mensonger. C'est la recherche d'une forme de vérité et d'une mémoire fuyante dans les rues de Buenos Aires et dans les villes argentines où trente mille personnes ont disparu lors de la dernière dictature (1976-1983), et où des centaines d'enfants furent volés par les militaires pour éradiquer le «gène rouge».
Quarante ans après le retour de la démocratie, dans un pays qui vient de voter contre lui-même, il manque encore des gens en Argentine. Les disparus le sont toujours. Les familles attendent. Certaines personnes ignorent qui elles sont réellement. Dans ce flou permanent, une femme, la narratrice, cherche à percevoir des fragments de cette mémoire voilée et volée sur une terre où, peut-être, s'est jouée une partie de sa propre histoire familiale.
L'absence est une femme aux cheveux noirs est fait d'images de flou et d'ombres, des photographies comme des éclairs de songes, et un texte fragmenté, comme des trous de mémoire, comme un monologue qui parfois s'emballe et devient fou. Et où, pourtant, tout est vrai.
Une déambulation littéraire et visuelle puissante, où les stigmates du passé se réveillent au contact d'un présent terrible. -
Le livre du large et du long
Laura Vazquez
- Éditions du sous-sol
- Feuilleton Fiction
- 10 Mars 2023
- 9782364686793
Une épopée versifiée, imaginée comme une exploration du monde par les actions, les gestes, les aventures.
La narratrice vit des scènes et des idées, dans son esprit et en dehors, à toute allure. Elle est tour à tour et à la fois : folle, amoureuse, malade, sage, inquiète, calmée.
Un livre comme une encyclopédie incarnée, libre et subjective, une lecture et une auscultation du monde, allant des plus petites choses : la peau, les insectes, les atomes ; aux plus larges : les populations humaines, la guerre, les ciels. Des choses les plus intérieures : les sensations, les questionnements propres ; aux plus matérielles : la médecine, l'anatomie, l'architecture.
Une foi dans le langage rendu à sa force et à sa netteté, à ses trouvailles «brisant les verrous des choses», un vif désespoir éclatant, un humour et une vivacité, un livre aussi réjouissant que troublant.
Après La Semaine perpétuelle (Éditions du sous-sol, mention spéciale du jury prix Wepler 2021) et son anthologie Vous êtes de moins en moins réels (Points, 2022), Laura Vazquez creuse une différence, un courage.